Le contentieux social est marqué par l’oralité de la procédure, spécialement en première instance : devant le Conseil de Prud’hommes, notamment, ou le Pole social s’agissant de certains litiges relevant du Droit de la sécurité sociale. Or ce mécanisme processuel impose, selon la Cour de cassation, la présence physique des parties à l’audience, ou de leur représentant.

Illustration est donnée de ce principe par l’arrêt ici éclairé de la seconde chambre civile. A défaut de réitérer oralement les moyens et demandes pourtant rédigées dans l’acte introductif d’instance, ceux-ci sont irrecevables.

 

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 21 mars 2019 (pourvoi n° 17-27.805, publié au bulletin)

(…)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 6 juin 2017), statuant sur renvoi après cassation (2e Civ., 9 janvier 2014, pourvoi n° 12-29.578) que la Réunion des assureurs maladie professions libérales d’Ile-de-France (la RAM) lui ayant décerné une contrainte pour le recouvrement des cotisations de l’année 2008 à hauteur de la somme de 997 euros, M. M…, exerçant à titre libéral l’activité de conseil, a formé opposition devant une juridiction de sécurité sociale, laquelle a validé la contrainte en litige ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. M… fait grief à l’arrêt de déclarer son appel irrecevable, alors, selon le moyen :

1°/ que les jugements statuant sur des demandes dont le montant est indéterminé sont susceptibles d’appel ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a elle-même constaté que M. M… formulait en première instance une demande de dommages-intérêts dont le montant n’était pas précisé ; qu’en décidant néanmoins que le jugement du 22 novembre 2010 n’était pas susceptible d’appel, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article R. 142-25 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que les juges sont tenus de ne pas dénaturer les actes de la procédure ; qu’en l’espèce, il résulte de l’acte introductif d’instance du 15 avril 2010 que M. M… sollicitait en première instance, non seulement l’annulation de la contrainte de 997 euros et l’allocation de dommages-intérêts, mais également le remboursement des cotisations versées à la FMP CAMPI ; qu’en retenant que M. M… se bornait, dans cette lettre introductive d’instance, à former opposition à une contrainte d’un montant inférieur au taux de ressort et à solliciter des dommages-intérêts sans en préciser le montant, la cour d’appel a dénaturé l’acte introductif d’instance du 15 avril 2010, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que le tribunal des affaires de sécurité sociale statue en dernier ressort jusqu’à la valeur de 4 000 euros ; qu’en l’espèce, M. M… rappelait qu’il sollicitait en première instance, non seulement l’annulation de la contrainte de 997 euros, mais également le remboursement des cotisations versées à la FMP CAMPI ainsi que l’indemnisation de son préjudice ; qu’en se bornant à relever que M. M…, dans son acte introductif d’instance, formait opposition à une contrainte d’un montant inférieur au taux de ressort, sans s’expliquer sur les autres chefs de demande formulés dans cette lettre du 15 avril 2010, la cour d’appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard de l’article R. 142-25 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu’il résulte de l’article R. 142-20-1 du code de la sécurité sociale que la procédure applicable au contentieux général de la sécurité sociale étant orale, seules les conclusions écrites, réitérées verbalement à l’audience des débats, saisissent valablement le juge ;

Et attendu que M. M… n’ayant pas comparu à l’audience, le tribunal des affaires de sécurité sociale n’était pas saisi de ses demandes reconventionnelles contenues dans sa lettre d’opposition à contrainte ;

D’où il suit que le moyen est inopérant ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. M… fait le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, que pour déterminer le taux du ressort et identifier la voie de recours dont le jugement peut faire l’objet, il faut s’attacher aux demandes formulées dans le cadre de conclusions écrites, dès lors qu’elles sont déposées au greffe, peu important que leur auteur n’ait pas comparu à l’audience sans en être dispensé ; qu’en effet, il est nécessaire d’identifier la voie de droit adéquate, pour déterminer si la procédure de première instance a été régulière, en l’état des demandes qui ont pu être formulées en première instance, quelle que soit la solution qu’on puisse in fine retenir quant à leur recevabilité ; qu’en refusant de prendre en compte les conclusions de M. M… en date du 23 septembre 2010, déposées au greffe, les juges du fond ont violé l’article R. 142-25 du code de la sécurité sociale, ensemble l’article R. 142-20-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu’à défaut pour M. M… d’avoir valablement saisi le tribunal de demandes reconventionnelles, c’est à bon droit que la cour d’appel ne les a pas prises en compte dans le calcul du taux de ressort ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi (…)