L’employeur est tenu à une obligation de recherche de reclassement, lorsque le médecin du travail émet un avis d’inaptitude physique du salarié : le licenciement n’est possible qu’en cas d’impossibilité ou refus du reclassement. A défaut la rupture est qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ce n’est que lorsque le médecin du travail mentionne expressément qu’aucune recommandation médicale ne peut être faite relativement au reclassement du salarié, que l’employeur est dispensé de recherches. Toutefois même si le médecin du travail coche la case « …l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement », l’employeur reste tenu à une telle obligation si le médecin ajoute tout de même des recommandations médicales permettant le reclassement.
Or ces recommandations peuvent résulter d’une formulation passive du médecin du travail : ainsi en est-il notamment si l’avis d’inaptitude mentionne que l’état de santé du salarié fait obstacle à son reclassement « sur le site » : des recherches de reclassement doivent dans ces conditions être menées sur les autres sites de l’entreprise. C’est ce que vient de confirmer la Cour de cassation dans l’arrêt ci-dessous reproduit.
COUR DE CASSATION, Chambre sociale, 13 décembre 2023
La société Glaxo Wellcome Production, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-19.603 contre l’arrêt rendu le 31 mai 2022 par la cour d’appel d’Angers (chambre sociale), dans le litige l’opposant à M. [M] [K], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
(…)
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Angers, 31 mai 2022), M. [K] a été engagé en qualité de préparateur de fabrication par la société Glaxo Wellcome Production, le 21 janvier 2002.
2. Le 23 octobre 2017, il a été déclaré inapte à son poste par un avis du médecin du travail mentionnant que « l’état de santé de M. [M] [K] (…) fait obstacle sur le site à tout reclassement dans un emploi ». Dans cet avis, le médecin du travail avait coché la case indiquant que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
3. Licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 27 novembre 2017, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes liées à la rupture de son contrat de travail.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, de le condamner à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en application de l’article 700 du code de procédure civile, et de le condamner à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées dans la limite de trois mois d’indemnités, alors « que selon l’article L. 1226-12 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ; qu’il s’ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel ; qu’en n’ayant pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le 23 octobre 2017, le médecin du travail avait déclaré le salarié inapte à son poste de travail au terme d’une seule visite et avait coché la case selon laquelle »l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi », ce qui avait précisément pour objet et pour effet de dispenser l’employeur de rechercher un reclassement et de consulter les délégués du personnel, la cour d’appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1226-12 et L. 1226-2-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
5. L’arrêt constate que le médecin du travail, qui a coché la case mentionnant que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi », a précisé que l’inaptitude faisait obstacle sur le site à tout reclassement dans un emploi.
6. L’arrêt ajoute que l’avis ne vaut que pour le site en Mayenne et relève que l’employeur dispose d’autres établissements.
7. La cour d’appel en a exactement déduit que l’employeur n’était pas dispensé, par un avis d’inaptitude du médecin du travail limité à un seul site, de rechercher un reclassement hors de l’établissement auquel le salarié était affecté et avait ainsi manqué à son obligation de reclassement.
8. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS (…) : REJETTE (…)
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