Les salariés bénéficiaires d’un contrat d’insertion doivent recevoir de la part de l’employeur, une formation destinée à favoriser leur re-socialisation. Cette mesure s’ajoute, dans l’entreprise, aux gains procurés par l’emploi proprement dit, de nature évidemment financière mais aussi morale.

Ainsi au-delà de l’accompagnement par les services publics, l’intégration dans une collectivité de travail, la reprise de rythmes et usages sociaux, et la rémunération afférentes au poste de travail occupé à temps plein ou temps partiel, ne sont pas les seuls avantages proposés aux personnes éligibles à ce type de contrat. Une formation doit en outre leur être dispensée, à la charge de l’employeur.

Les abus sur ce point entraînent la requalification du contrat en emploi à durée indéterminée de principe, avec toutes les conséquences connues : requalification de la rupture, rappel de salaire, indemnisation de l’exécution déloyale etc. Cet abus peut être par exemple retenu, dès lors qu’aucune formation n’est dispensée au salarié en insertion, considéré comme un travailleur « au rabais ».

Mais en aucune manière il n’est imposé de dispenser une formation qualifiante, au sein d’organismes ou par des intervenants extérieurs à l’entreprise. La confusion est régulièrement commise, et entraîne des contentieux inutiles.

Ainsi le salarié peut-il recevoir une formation sur son poste de travail, à des tâches professionnelles, de simples comportements ou des fonctions annexes, et ce dans l’environnement de travail et par des collègues. Il suffit que ces mesures d’accompagnement soient mentionnées sur la convention afférente au contrat : c’est ce que rappelle la Cour de cassation dans l’arrêt ci-dessous reproduit.



ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, 16 MARS 2022 (pourvoi n° 20-22.581, publié au Bulletin)
(…)

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 29 mai 2019), Mme [N] a été engagée, le 8 janvier 2015, par le Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres par contrat d’accompagnement dans l’emploi, pour la période du 12 janvier 2015 au 11 janvier 2016, renouvelé par avenant du 18 janvier 2016, pour la période du 12 janvier 2016 au 11 janvier 2017, afin d’occuper un emploi de personnel polyvalent des services hospitaliers à hauteur de vingt heures par semaine.

2. La salariée a saisi la juridiction prud’homale le 5 mai 2017 de demandes tendant à la requalification de son contrat en un contrat à durée indéterminée pour manquement de l’employeur à son obligation de formation et en paiement de diverses sommes à titre indemnitaire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que l’obligation pour l’employeur d’assurer des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel du salarié et destinées à le réinsérer durablement constitue une des conditions d’existence du contrat d’accompagnement dans l’emploi à durée déterminée, à défaut de laquelle le contrat d’accompagnement dans l’emploi doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’il en résulte que, lorsque la compétence du salarié, antérieure à la conclusion du contrat d’accompagnement dans l’emploi, est telle qu’il n’y avait pas lieu de lui dispenser une formation qualifiante, le contrat d’accompagnement dans l’emploi doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en déboutant, par conséquent, Mme [B] [N] de sa demande de requalification du contrat d’accompagnement dans l’emploi qu’elle avait conclu le 8 janvier 2015 avec le Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres en contrat de travail à durée indéterminée et de ses demandes subséquentes, quand elle relevait que Mme [B] [N] justifiait d’une compétence, antérieure à la conclusion du contrat d’accompagnement dans l’emploi, acquise dans le cadre de deux formations en matière de gestes et soins d’urgence de niveau 2 et aux fonctions d’auxiliaire ambulancier lui permettant d’occuper un emploi de personnel polyvalent des services hospitaliers et qu’en conséquence, il n’y avait pas lieu de dispenser à Mme [B] [N] une formation qualifiante, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions des articles L. 1242-3, L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail ;

2°/ que l’obligation pour l’employeur d’assurer des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel du salarié et destinées à le réinsérer durablement constitue une des conditions d’existence du contrat d’accompagnement dans l’emploi à durée déterminée, à défaut de laquelle le contrat d’accompagnement dans l’emploi doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée ; que l’employeur, qui a conclu un contrat d’accompagnement dans l’emploi et qui se borne à prodiguer au salarié une aide à la prise de poste et une adaptation au poste de travail par une formation en interne sans validation des acquis de l’expérience, ne remplit pas son obligation d’assurer des actions de formation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel du salarié ; qu’en déboutant, par conséquent, Mme [B] [N] de sa demande de requalification du contrat d’accompagnement dans l’emploi qu’elle avait conclu le 8 janvier 2015 avec le Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres en contrat de travail à durée indéterminée et de ses demandes subséquentes, quand les seules mesures dont Mme [B] [N] avait bénéficié et dont elle relevait l’existence consistaient en une aide à la prise de poste et en une adaptation au poste de travail par une formation en interne sans validation des acquis de l’expérience, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions des articles L. 1242-3, L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail ;

3°/ que l’obligation pour l’employeur d’assurer des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel du salarié et destinées à le réinsérer durablement constitue une des conditions d’existence du contrat d’accompagnement dans l’emploi à durée déterminée, à défaut de laquelle le contrat d’accompagnement dans l’emploi doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée ; que c’est à l’employeur qu’il appartient d’engager les actions de formation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel du salarié qui lui incombent, de sorte que les circonstances que le salarié n’a déterminé aucun projet professionnel, ni exprimé le souhait de s’inscrire dans le cadre d’un projet professionnel différent ou de rechercher un autre emploi ou de bénéficier d’une formation donnée ne dispensent pas l’employeur de son obligation de formation ; qu’en énonçant, dès lors, pour débouter Mme [B] [N] de sa demande de requalification du contrat d’accompagnement dans l’emploi qu’elle avait conclu le 8 janvier 2015 avec le Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres en contrat de travail à durée indéterminée et de ses demandes subséquentes, que Mme [B] [N] n’avait déterminé aucun projet professionnel et n’avait pas exprimé le souhait, lors de la signature du contrat d’accompagnement dans l’emploi, de s’inscrire dans le cadre d’un projet professionnel différent ou de rechercher un autre emploi, ni ne démontrait avoir exprimé le souhait de se former dans le domaine informatique et, notamment, aux logiciels métier applicables sur son poste de travail et en matière de réception et de gestion de stock, quand ces circonstances étaient inopérantes, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L. 1242-3, L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Ayant constaté que le contrat d’accompagnement dans l’emploi du 8 janvier 2015 et son avenant du 18 janvier 2016 prévoyaient, s’agissant des actions d’accompagnement professionnel, que la salariée devait bénéficier d’une aide à la prise de poste par des formations en interne et que le suivi d’un cursus de formation qualifiante par l’acquisition de nouvelles compétences n’était pas prévu, la cour d’appel, qui a relevé que la salariée avait bénéficié d’une formation en interne portant sur l’adaptation à son poste par un travail en binôme pour acquérir plus d’autonomie et une meilleure organisation et méthodologie, que le compte-rendu d’évaluation de la salariée démontrait que l’accompagnement dans l’emploi et l’aide à la prise de poste avaient bien été effectués, les appréciations portées sur la salariée étant positives sur son intégration à son poste de travail, a pu en déduire que l’employeur avait satisfait à son obligation de formation et d’accompagnement.

5. Le moyen, qui, pris en ses première et troisième branches, est inopérant en ce qu’il critique des motifs surabondants, n’est pas fondé.

PAR CES MOTIFS (…) : REJETTE (…)