La Cour de cassation poursuit, à l’occasion des contentieux qui lui sont présentés (et qui semblent accrus depuis quelques années), la consolidation prétorienne du régime de la rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée, comme en témoigne l’arrêt ici signalé. La position de la Chambre sociale consiste à valider ce mode spécifique de résiliation à l’initiative conjointe de l’employeur et du salarié, quelle que soit la situation, sauf à ce que la procédure impérative des articles L.1237-11 et suivants du Code du travail soit formellement irrégulière, ou que la volonté du salarié ne soit entachée d’un vice ou déloyalement obtenue.

Ainsi lorsque le salarié n’a pas été assisté dans les premiers mouvements de cette procédure (négociation et conclusion de la convention de rupture, et formalisation du bordereau administratif), alors que l’employeur bénéficiait d’une assistance interne, la rupture ne peut être annulée que si le salarié démontre que son consentement n’a pas été librement donné. Attention tout de même à la lecture de cette décision publiée : si l’employeur n’établit pas que le salarié a été expressément informé de la possibilité d’être assisté durant tout le déroulement de l’opération, il prend le risque que le Juge n’admette aisément le vice du consentement salarial.

 

 

Cour de cassation, Chambre sociale, (pourvoi n° 18-10.901, publié au Bulletin)
(…)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Fort-de-France, 9 septembre 2016), qu’engagé le 1er décembre 2010 en qualité de jardinier par la société Services-Antilles.Com, M. T… a signé une convention de rupture le 14 février 2013 ; qu’il a saisi le 24 juillet 2013 la juridiction prud’homale d’une contestation de la validité de cette rupture ;
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de valider la convention de rupture et de le débouter de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1°/ que le formalisme protecteur des articles L. 1237-11 et 1237-12 du code du travail commande de tenir pour irrégulière une convention de rupture signée par l’employeur assisté de son conseil tandis que le salarié a signé seul, sans avoir été préalablement informé de son droit à être assisté ni de la circonstance que son employeur serait lui-même assisté lors de la signature de la convention ; qu’en refusant de tirer les conséquences nécessaires de pareil déséquilibre, l’arrêt infirmatif, qui n’a par ailleurs pas établi le caractère raisonnable des dispositions matérielles de la convention au regard des droits du salarié, a violé les textes susvisés ;
2°/ que, dans ses conclusions péremptoires, le salarié faisait valoir que la convention de rupture avait été antidatée au 14 février 2013 lors même qu’il avait travaillé tout le mois de février, de sorte qu’il avait privé de son délai effectif de rétractation de 15 jours avant homologation par l’administration ; qu’en validant néanmoins la convention sans répondre au moyen dont elle était saisie sur la fraude qui entachait cette dernière, la cour a derechef violé les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d’appel a exactement décidé que l’assistance de l’employeur lors de l’entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l’entretien ; qu’ayant constaté que tel n’était pas le cas en l’espèce, elle a rejeté à bon droit la demande du salarié ; que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n’est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi (…)