Le salarié victime d’un accident du travail bénéficie d’un régime protecteur dans le cadre de sa relation de travail salariée, au-delà de sa prise en charge majorée par le régime de sécurité sociale. Ainsi son licenciement est-il en principe nul, pendant la suspension du contrat de travail imposée par les arrêts-maladie.

Toutefois l’employeur peut exceptionnellement décider de son licenciement, pour un motif étranger à l’accident du travail, et rendant impossible le maintien du salarié sur son poste de travail. La Cour de cassation illustre ce cas de figure, dans l’arrêt reproduit ci-dessous par extraits.

Ainsi le licenciement pour motif économique est-il licite, lorsque l’entreprise cesse son activité. A noter que dans cette hypothèse, la jurisprudence a par ailleurs allégé l’obligation de recherche de reclassement à la charge de l’employeur.

COUR DE CASSATION, Chambre Sociale, 11 septembre 2024 (pourvoi n° 22-18.409, publié au Bulletin)


La société Les Mandataires, société par actions simplifiée, représentée par M. [PB] [A], ayant son siège [Adresse 20],
ayant un établissement, [Adresse 16], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société OFP Maintenance,
anciennement représentée par la société Ortec industrie, agissant en qualité de liquidateur amiable de la société OFP
Maintenance, a formé le pourvoi n° Q 22-18.409 contre l’arrêt rendu le 7 avril 2022 par la cour d’appel de Grenoble
(chambre sociale, section B), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [R] [I], domicilié [Adresse 5],
(…)

Faits et procédure

  1. Selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 7 avril 2022), Mme [T] ainsi que MM. [I], [F], [V], [P], [J], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W],
    [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E] ont été engagés par la société OFP Maintenance.
  2. La société OFP Maintenance avait conclu, en octobre 2006, un contrat d’entretien et de maintenance sur le site
    chimique de [Localité 24] qui a été attribué, à compter du 31 mai 2017, à la société Sud-Ouest déchets industriels.
  3. En conséquence, en juin 2017, la société OFP Maintenance a proposé aux salariés un contrat de sécurisation
    professionnelle qu’ils ont accepté.
  4. Par décisions des 20 juillet et 28 août 2017, l’administration a autorisé le licenciement de Mme [T] et MM. [I], [J], [PI],
    [W], [O] et [UB] qui avaient le statut de salariés protégés. Ces autorisations ont ensuite été annulées au motif que les
    contrats de travail auraient dû être transférés en application de l’article L. 1224-1 du code du travail.
  5. En septembre et novembre 2018, les vingt salariés ont saisi la juridiction prud’homale pour contester la rupture de
    leur contrat de travail.
  6. Par jugement du 1er septembre 2022, la société OFP Maintenance, alors en liquidation amiable, a été placée en
    liquidation judiciaire et la société Les Mandataires a été désignée en qualité de liquidateur.

    Examen des moyens
    (…)
  7. La société Les Mandataires, ès qualités, fait grief à l’arrêt de condamner la société OFP Maintenance à payer des
    dommages-intérêts pour licenciement nul à M. [J] et d’ordonner à cette société de rembourser à Pôle emploi les
    indemnités de chômages perçues par ce salarié, dans la limite de six mois d’indemnités, alors « que la cessation d’activité réelle de l’entreprise rend impossible le maintien du contrat de travail du salarié en arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle et permet donc de rompre son contrat ; qu’en l’espèce, la cessation d’activité de la société OFP Maintenance n’était pas contestée ; qu’en affirmant cependant que cette société ne démontrait pas l’impossibilité de maintenir le contrat de travail du salarié pour un motif non lié à l’accident du travail, la cour d’appel a violé l’article L. 1226-9 du code du travail. »

    Réponse de la Cour
    Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail :
  8. Dès lors que la cessation d’activité est réelle et qu’elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, la résiliation
    de ce contrat n’est pas contraire aux dispositions de l’article L. 1226-9 du code du travail relatives au licenciement d’un
    salarié pendant une période de suspension consécutive à un accident du travail.
  9. Pour juger le licenciement nul, l’arrêt constate d’abord que, à la date d’expiration du délai dont le salarié disposait
    pour prendre parti sur la proposition d’un contrat de sécurisation professionnelle, son contrat de travail était suspendu à la suite d’un accident du travail, puis retient ensuite que l’employeur, qui ne répond pas au moyen du salarié, n’apporte aucune pièce permettant de démontrer l’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l’accident du travail.
  10. En statuant ainsi, alors que la cessation totale et définitive d’activité de la société OFP Maintenance n’était pas
    contestée, ce dont il résultait l’impossibilité pour l’employeur de maintenir le contrat de travail du salarié, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
    (…)
    PAR CES MOTIFS (…) : CASSE ET ANNULE (…)