Le commencement d’une année nouvelle symbolise à la fois l’éternité (espérée…) du cycle de la Vie, et la finitude inexorable d’une vie au niveau de l’individu. Nous faisons le bilan d’une année écoulée, et y laissons ce qui n’a pas vocation à perdurer, et prévoyons le chantier de ce qui doit être modifié à l’avenir.
Parmi toutes les institutions, la Cour de cassation procède ainsi à la « cérémonie du renouvellement », et elle publie désormais les allocutions de ses responsables ainsi que des informations intéressantes pour les évolutions du système judiciaire français. Le Premier Président ainsi que le Procureur Général ont ainsi solennellement fait état, le 9 janvier dernier, et devant un public expert, de leurs impressions sur l’état de la Justice et sur les voies nécessaires à son amélioration et son adaptation aux mouvements de la société.
Il est remarquable de constater que parmi les grands sujets ayant retenu l’attention des deux plus hauts magistrats français (les procès du terrorisme, les questions sociétales liées à la filiation ou à l’état des personnes, la protection du consommateur etc.), le Droit du travail occupe une place importante. Respect de la vie privée du salarié (réseaux sociaux), liberté religieuse, satut du salarié lanceur d’alerte, égalité professionnelle, protection de la santé du travailleur dans le cadre de la crise sanitaire, temps de travail etc. sont expressément cités pour rendre compte de l’exercice 2022, mais aussi anticiper les problématiques de l’exercice 2023, dans le souci de communiquer avec transparence sur les sujets que le Juge suprême compte aborder cette année.
Probablement que la statistique permet, entre autres causes, d’expliquer cet intérêt de la Cour de cassation pour le Droit social. En effet le contentieux en la matière est majoritaire, à son niveau : 34 % des affaires civiles pour le contentieux prud’homal, 8% pour le contentieux de la protection sociale, pour un secteur civil représentant les deux tiers des pourvois en cassation.
Avec le Droit pénal du travail, le contentieux social largement considéré représente à lui seul 30 % des affaires que traite la Cour de cassation (ce qui ne rend pas compte de son volume, bien moindre, devant les juridictions du fond). Même si toutes ne donnent pas lieu à une décision, ni encore moins à une cassation de la décision au fond, la dimension de ce contentieux interpelle.
Elle est à mettre en rapport avec les données statistiques de ce contentieux social, au niveau des juridictions du fond : les jugements prud’homaux sont en effet ceux qui sont le plus souvent frappés de recours, et réformés. Il ne faudrait pas en déduire que la qualité de ces décisions est décevante : la réformation du jugement relève la plupart du temps d’une appréciation différente des circonstances de fait, non d’une mauvaise application de la règle de Droit.
Or l’intérêt de cette Justice prud’homale, comme de celle de toutes les juridictions « consulaires », est justement de permettre une appréciation différente des situations à juger (dans le cadre impératif très strict d’une règlementation sociale dont on vante ou critique souvent la prégnance, la complexité et l’inflation…) que celle attendue des techniciens du Droit. A l’heure où la réforme de la Justice, toujours en chantier, remet en cause la configuration actuelle des Conseils de prud’hommes, il est important (comme d’habitude) de ne pas se tromper sur l’interprétation des données statistiques.
Pour en savoir plus :
https://www.courdecassation.fr/toutes-les-actualites/2023/01/06/audience-solennelle-de-rentree-2023
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