Tout avantage perçu par le salarié en contrepartie ou à l’occasion du travail, entre dans l’assiette des cotisations sociales, et constitue un élément de rémunération. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire que l’avantage soit versé par l’employeur : il peut l’être par un tiers, client de l’entreprise notamment (pourboires).

L’employeur doit donc par exempe intégrer la valeur de cet avantage dans le calcul du taux horaire global, pour rémunérer les heures supplémentaires. Par ailleurs il doit déclarer cet avantage au titre des rémunérations salariales auprès des organismes collecteurs.

La voiture de fonction est l’un de ces avantages en nature, pour l’usage personnel qu’en fait le salarié. Or c’est à l’employeur de démontrer qu’il ne met à disposition un véhicule de service, que pour les besoins professionnels et non pour un usage personnel, s’il veut échapper à cette qualification d’avantage en nature.

Cette preuve lui est imposée même quand il verse à un tiers, propriétaire du véhicule, une somme en contrepartie de l’usage professionnel de ce véhicule mis à disposition du salarié. Il lui revient en effet de démontrer que cette somme ne couvre exclusivement que l’usage professionel, si le salarié fait un usage personnel du véhicule.

Un montage selon lequel les salariés d’une entreprise sont adhérents d’une association propriétaire de véhicules mis à leur disposition, et dont l’employeur rembourse la quote-part professionnelle, est donc fragilisé si l’employeur ne peut pas justifier du kilométrage pris en charge et de sa justification professionnelle. C’est ce que décide la Cour de cassation dans l’arrêt ci-dessous principalement reproduit.

COUR DE CASSATION, 2ème Chambre civile, 9 Janvier 2025 (pourvoi n° 22-15.766, publié au Bulletin)

La société [4], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société [5], a formé le
pourvoi n° S 22-15.766 contre l’arrêt rendu le 16 mars 2022 par la cour d’appel de Montpellier (3e chambre sociale), dans
le litige l’opposant à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) de
Languedoc-Roussillon, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
(…)


Faits et procédure

  1. Selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 16 mars 2022), à la suite d’un contrôle portant sur l’année 2003, suivi d’une lettre
    d’observations du 12 octobre 2006, l’URSSAF de [Localité 6], aux droits de laquelle vient l’URSSAF de Languedoc-
    Roussillon (l’URSSAF), a notifié une mise en demeure du 15 décembre 2006 à la société [5], aux droits de laquelle vient la
    société [4] (la société cotisante), laquelle a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
  2. (…)
  3. La société cotisante fait grief à l’arrêt de valider le chef de redressement relatif à l’avantage en nature véhicules et de
    porter le montant de la condamnation à une certaine somme, alors « qu’il résulte de l’article L. 242-1 du code de la
    sécurité sociale et de l’article 3 de l’arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du
    calcul des cotisations sociales, que revêt le caractère d’un avantage en nature, l’usage privé par un salarié du véhicule
    que son employeur met à sa disposition permanente et dont il assume entièrement la charge ; que, par motifs adoptés,
    la cour d’appel a relevé que des salariés de la société bénéficient de la mise à disposition permanente d’un véhicule
    automobile de tourisme fourni par l’Association des utilisateurs de véhicules dont ils sont membres et à laquelle ils
    versent une cotisation, que la société verse à l’association les indemnités kilométriques qui lui sont facturées pour les
    déplacements effectués à titre professionnel par les salariés, que la société n’a pas justifié du nombre de kilomètres
    parcourus à titre professionnel par chacun des salariés et du taux retenu alors qu’il lui incombe de démontrer que les
    sommes qu’elle verse au titre des indemnités kilométriques sont utilisées conformément à leur objet et qu’à défaut, les
    sommes remboursées à l’association au titre des indemnités kilométriques constituent un avantage en nature dans la
    mesure où elles diminuent d’autant le montant de la cotisation due par les utilisateurs adhérents de l’association en
    contrepartie de la mise à disposition de ces véhicules, que cette prise en charge par la société fait réaliser une économie
    à ses salariés qui constitue dès lors un complément de rémunération soumis à cotisations ; qu’en statuant ainsi par des
    motifs dont il ressort que la société n’a pas mis à la disposition permanente de ses salariés un véhicule dont elle
    assumait entièrement la charge, la cour d’appel qui n’a pas caractérisé, dans son principe et son montant l’existence de
    l’avantage en nature litigieux, a violé les textes susvisés. »

    Réponse de la Cour
  4. Il résulte de l’article L. 242-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que les
    avantages en nature attribués en contrepartie ou à l’occasion du travail sont compris dans l’assiette des cotisations de
    sécurité sociale.
  5. En application de l’article 3 de l’arrêté du 10 décembre 2002 modifié, relatif à l’évaluation des avantages en nature en
    vue du calcul des cotisations sociales, lorsque l’employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou
    assimilé un véhicule, l’avantage en nature constitué par l’utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de
    l’employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d’un forfait annuel en pourcentage du coût
    d’achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l’entretien et l’assurance du véhicule en location ou en location avec option d’achat, toutes taxes comprises.
  6. Il résulte de ces textes que la mise à la disposition permanente, par l’employeur, au profit de ses salariés, d’un véhicule
    pouvant être utilisé pour leurs déplacements privés, permettant ainsi aux bénéficiaires de faire l’économie de frais de
    transport qu’ils devraient normalement assumer, constitue, en principe, un avantage en nature.
  7. La circonstance selon laquelle le véhicule est mis à la disposition permanente de salariés par l’intermédiaire d’un tiers
    ne saurait faire obstacle à la constatation de l’existence d’un avantage en nature, lorsque l’attribution de cet avantage
    résulte de l’appartenance des salariés à l’entreprise.
  8. L’administration de la preuve de cet avantage en nature doit être gouvernée par les règles générales applicables en
    cette matière.
  9. Ainsi, s’il incombe d’abord à l’URSSAF d’établir, notamment par le procès-verbal des agents de contrôle qui fait foi
    jusqu’à preuve contraire, la mise à disposition permanente, par l’employeur, d’un véhicule au profit de ses salariés, il
    appartient ensuite à l’employeur de démontrer que cette mise à disposition, fût-ce par l’intermédiaire d’un tiers, est
    exclusive de tout avantage en nature.
  10. L’employeur doit, par conséquent, rapporter la preuve qu’il prend exclusivement en charge le coût afférent aux
    kilomètres parcourus par ses salariés dans le cadre de leurs déplacements professionnels, sans aucune participation au
    coût de l’usage personnel du véhicule par ces derniers.
  11. Si, conformément à l’article 1358 du code civil, cette preuve peut être rapportée par tout moyen, elle ne peut
    cependant résulter des seules facturations établies par le tiers qui met les véhicules à disposition des salariés, lesquelles doivent être corroborées par d’autres éléments de preuve.
  12. L’arrêt relève, par motifs adoptés, qu’une partie du personnel de la société cotisante bénéficie de la mise à
    disposition permanente d’un véhicule automobile fourni par l’association des utilisateurs de véhicules, dont les
    adhérents sont les cadres et les employés, techniciens et agents de maîtrise du groupe [3]. Il constate que ceux-ci sont
    tenus de verser une cotisation à l’association qui perçoit de la société cotisante des indemnités kilométriques qu’elle lui
    facture au titre des déplacements professionnels de ses salariés. Il retient que la société cotisante, à laquelle il appartient de démontrer que les sommes qu’elle verse au titre des indemnités kilométriques sont utilisées conformément à leur objet, ne justifie pas du nombre de kilomètres parcourus par chacun des salariés à titre professionnel. Il en déduit que la prise en charge par la société cotisante, en contrepartie de la mise à disposition de ces véhicules, des sommes remboursées à l’association au titre des indemnités kilométriques fait réaliser une économie à ses salariés utilisateurs des véhicules et constitue dès lors un avantage en nature soumis à cotisations sociales.
  13. De ces constatations et énonciations, procédant de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de
    preuve débattus devant elle, la cour d’appel, ayant estimé que les éléments de preuve apportés par la société cotisante
    étaient insuffisants à démontrer qu’elle prenait exclusivement en charge les déplacements professionnels effectués par
    ses salariés, a exactement déduit que l’URSSAF était fondée à procéder au redressement de ce chef.
  14. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.
    PAR CES MOTIFS (… : REJETTE (…)