Les congés payés constituent essentiellement un droit au repos au profit des salariés, en garantie de leurs santé et sécurité. La rétribution de ce temps de repos est une donnée importante mais secondaire.

Ainsi rares sont les occasions laissées par le Code du travail, transposant largement sur ce thème les dispositions des normes communautaires, d’exonérer le travailleur de la prise de repos effectif : principalement on pense à la cinquième semaine de congés payés, qui peut notamment être versée sur un compte épargne-temps, ou faire l’objet d’un don à un collègue, etc. Par ailleurs si le salarié n’a pu effectivement bénéficier de ses congés payés à la rupture du contrat de travail, c’est exceptionnellement que la Loi lui accorde ici une indemnité compensatrice.

En aucune manière l’employeur ne pourrait remplacer, même avec l’accord de l’intéressé, les congés d’un salariés par une indemnité même majorée. L’arrêt ici signalé de la Cour de cassation donne une illustration de cette prohibition, dans une hypothèse où a priori n’apparaît aucun malin dessein de l’entreprise employeur…

En vue de laisser au salarié une autonomie des plus larges, il était en l’espèce contractuellement convenu que sa rémunération mensuelle forfaitaire contiendrait le montant dû au titre des congés payés. Ces modalités ne sont pas en soi illicites, puisqu’elles sont notamment expressément prévues pour la rémunération par CESU.

Toutefois la Chambre sociale exige alors une clause de rémunération expresse, claire et compréhensible, distinguant précisément l’indemnité de congés payés et les autres éléments de rémunération. Mais il est surtout nécessaire de pouvoir imputer cette indemnisation des congés sur un temps de repos effectif.

 

Arrêt n°826 du 22 mai 2019 (17-31.517) - Cour de cassation, Chambre sociale, 22 mai 2019 (pourvoi n° 17-31.517, publié au bulletin)

(...)

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. O...  a été engagé le 1er octobre 2008 par la société Fidal en qualité d’avocat salarié moyennant une rémunération incluant les congés payés ; qu’après avoir démissionné courant décembre 2013, il a quitté les effectifs de l’entreprise le 17 mars 2014 ; qu’il a saisi le bâtonnier de son ordre de demandes en paiement à titre d’indemnité compensatrice de congés payés, de bonus et de prime d’objectif ;

(...)

Vu les articles L. 3141-22 et L. 3141-26 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, interprétés à la lumière de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

Attendu que s’il est possible d’inclure l’indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire lorsque des conditions particulières le justifient, cette inclusion doit résulter d’une clause contractuelle transparente et compréhensible, ce qui suppose que soit clairement distinguée la part de rémunération qui correspond au travail, de celle qui correspond aux congés, et que soit précisée l’imputation de ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d’indemnité compensatrice de congés payés, l’arrêt retient qu’aux termes de l’article 5 des conditions générales du contrat liant les parties, la rémunération a un caractère global et inclut la rémunération de la totalité des congés payés afférents à la période de référence légale, qu’aux termes de l’article 1 des conditions particulières du contrat, la rémunération annuelle est composée d’une partie fixe d’un montant annuel de 70 200 euros bruts, indemnité de congés payés de la période de référence incluse, qu’à défaut d’une clause plus favorable au salarié, l’indemnité de congés payés est égale, en vertu de l’article L. 3141-24 du code du travail, au dixième de la rémunération perçue par le salarié au cours de la période de référence qui est en l’espèce l’exercice 2013-2014 jusqu’au départ du salarié, que les dispositions du contrat de travail liant les parties concernant les congés payés sont claires, expresses et compréhensibles par le salarié, que les clauses susvisées concernant les congés payés apparaissent donc valables, que l’employeur produit le guide du calcul des congés payés en cas de départ en cours d’exercice, que dans le bulletin de salaire du 1er mars 2014 au 17 mars 2014, date à laquelle le salarié a quitté l’entreprise, figure une indemnité compensatrice de congés payés acquis de 3 600 euros et une rémunération brute de 7 453,33 euros, que dans le décompte de rémunération pour l’exercice 2013/2014, la rémunération brute est de 34 981 euros, que le salarié, qui conteste pas que les sommes susvisées ont été portées sur les documents cités, n’apporte pas non plus de preuve qu’elles seraient erronées, que le montant de l’indemnité de congés payés est supérieur à 10 % de la rémunération brute ;

Qu’en statuant ainsi, alors, d’une part, qu’elle avait constaté que le contrat de travail, en ses conditions générales et particulières, se bornait à stipuler que la rémunération globale du salarié incluait les congés payés, ce dont il résultait que cette clause du contrat n’était ni transparente ni compréhensible, d’autre part, qu’il n’était pas contesté que, lors de la rupture, le salarié n’avait pas pris effectivement un reliquat de jours de congés payés, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE (...)