Le sujet de la libéralisation de l’usage du canabis fait débat depuis de nombreuses années.La décision rendue par la Cour de cassation, refusant de transmettre une QPC, dans l’arrêt du 14 février 2024 ci-dessous reproduit, permet de guider l’analyse du Droit positif, et constitue un guide pour l’entreprise dans le champ disciplinaire ou en matière de santé et sécurité au travail : ainsi par exemple, lors de la rédaction du règlement intérieur.

Consommer du CBD n’est pas prohibé en soi : il ne figure pas sur la liste des produits stupéfiants, sous une certaine concentration. Mais conduire un véhicule lorsqu’on a consommé du CBD, quelle que soit sa concentration, est une infraction pénale sans que cette mesure ne soit contraire aux principes constitutionnels.

C’est donc ce que vient de rappeler la Chambre criminelle. Ce raisonnement doit s’étendre à toute appréciation de la contrainte posée par l’employeur quant à la consommation de CBD par les salariés de l’entreprise.

COUR DE CASSATION, Chambre criminelle, 14 février 2024 (pourvoi n° 23-90.024, publié au Bulletin)

Le tribunal correctionnel de Nantes, par jugement en date du 15 novembre 2023, reçu le 21 novembre 2023 à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure suivie contre M. [V] [N] des chefs d’infractions à la législation sur les stupéfiants, conduite après usage de stupéfiants, en récidive, et contravention au code de la route.
(…)
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« L’alinéa premier du paragraphe I de l’article L. 235-1 du code de la route porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution que sont le principe de proportionnalité, le principe de légalité des délits et des peines et le principe de nécessité des peines tels qu’il résultent de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, en ce qu’il ne fait pas référence à un taux fixé par le règlement d’imprégnation au delta-9-tétrahydrocannabinol mesuré par des analyses et examens sanguins ou salivaires au-delà duquel l’infraction réprimée est caractérisée, ou de tout procédé permettant de vérifier si la concentration de delta-9-tétrahydrocannabinol mesurée dans le sang ou la salive de la personne dépistée est dépourvue de toute propriété stupéfiante, visant à différencier les consommateurs de produits au cannabidiol de ceux consommant du cannabis ? ».

2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure.

3. L’alinéa 1er du I de l’article L. 235-1 du code de la route, dans sa version issue de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, a été déclaré conforme à la Constitution par décision n°2011-204 QPC du 9 décembre 2011 du Conseil constitutionnel.

4. Cependant, l’article L. 235-1 du code de la route, dans sa version applicable au litige, a été modifié, pour la dernière fois, par la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019.

5. La question posée ne présente pas un caractère sérieux.

6. En effet, d’une part, il est loisible au législateur d’instituer une qualification pénale particulière pour réprimer la conduite d’un véhicule lorsque le conducteur a fait usage de stupéfiants.

7. D’autre part, il appartient au pouvoir réglementaire, sous le contrôle du juge compétent, en l’état des connaissances scientifiques, médicales et techniques, tant de classer certaines substances dans la catégorie des stupéfiants, que de fixer les seuils minima de détection témoignant de l’usage de ces substances.

8. Dès lors, l’autorisation de commercialiser certains dérivés du cannabis, dont la teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol, substance elle-même classée comme stupéfiant par arrêté, n’est pas supérieure à 0,30 %, est sans incidence sur la conformité de la disposition contestée au principe de proportionnalité et au principe de légalité des délits et des peines.

9. En conséquence, il n’y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS (…) : DIT N’Y AVOIR LIEU DE RENVOYER (…)