Il est indispensable d’anticiper dans le contrat de travail, le mode de calcul de la part variable de rémunération le cas échéant convenue avec le salarié. La rémunération est en effet un élément essentiel du contrat, et l’employeur ne peut être autorisé à fixer unlitéralement cette clause.

Ainsi la mesure des résultats du salarié ne peut dépendre que d’éléments objectifs, et la Direction ne peut modifier seule la cible affectée à l’intéressé, si cela entraîne une modification de la rémunération. La Cour de cassation réforme régulièrement les décisions qui oublient cette constante.

Par ailleurs les objectifs affectés au salarié doivent être clairement établis. C’est la raison pour laquelle dans l’arrêt ci-dessous reproduit par extraits, la Chambre sociale neutralise un avenant contractuel rédigé en anglais, alors que le poste de travail se situait en France et ne nécessitait pas exclusivement l’usage de cette langue.

COUR DE CASSATION, Chambre sociale, 11 octobre 2023 (pourvoi n° 22-13.770, publié au Bulletin)

M. [Z] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 22-13.770 contre l’arrêt rendu le 20 janvier 2022 par la cour d’appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l’opposant à la société Unisys France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
(…)

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 20 janvier 2022), M. [D] a été engagé en qualité de directeur de mission par la société Unisys France à compter du 15 mars 2004. En dernier lieu, il exerçait les fonctions de chef de projet avant-vente ressources.

2. Le 27 décembre 2017, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes relatives à l’exécution et à la rupture de son contrat de travail.

3. La relation de travail a pris fin le 31 décembre 2017.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de rémunération variable et d’indemnités conventionnelles et incitatives de départ volontaire à la retraite et de le condamner au paiement d’une certaine somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, alors « que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable d’un salarié qui ne sont pas rédigés en français lui sont inopposables ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui a constaté que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable du salarié étaient rédigés en langue anglaise, mais a néanmoins décidé que « cette circonstance ne peut suffire à rendre inopposable au salarié les plans de rémunération » et a débouté le salarié de sa demande de rappel de rémunération variable, a ainsi violé l’article L. 1321-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 1321-6 du code du travail :

5. Selon ce texte, tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l’exécution de son travail doit être rédigé en français. Cette règle n’est pas applicable aux documents reçus de l’étranger ou destinés à des étrangers.

6. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de rappels de salaire sur rémunération variable, l’arrêt relève que les documents de travail, donnant lieu à des traductions dans le cadre du présent litige, étaient rédigés en langue anglaise, utilisée au sein de l’entreprise, par ailleurs filiale d’une société américaine. Il retient que cette circonstance ne peut suffire à rendre inopposables au salarié les plans de rémunérations.

7. En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle n’étaient pas rédigés en français, la cour d’appel, qui n’a pas constaté qu’ils avaient été reçus de l’étranger, a violé le texte susvisé.

(…)

PAR CES MOTIFS (…) : CASSE ET ANNULE (…)