Le médecin du travail qui prononce notamment l’inaptitude du salarié au poste de travail dans l’entreprise, rend un avis … d’inaptitude, qui déclenche donc toutes les conséquences prévues par la règlementation sociale. Ainsi l’employeur doit-il par exemple ne pas accueillir le salarié sur son poste de travail, reprendre le paiement des salaires après 30 jours, ou encore procéder à son licenciement s’il ne justifie pas de recherches actives de reclassement.

Il s’agit d’un avis d’inaptitude, et ce même si le médecin du travail a (maladroitement…) mal rédigé cet avis notifié aux parties, en indiquant par exemple qu’il s’agit d’un avis d’aptitude, ou que le salarié est apte sur un autre poste de travail dans l’entreprise, qu’il décrit par ailleurs. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans l’arrêt ci-dessous reproduit par extraits.

COUR DE CASSATION, Chambre sociale, 29 janvier 2025 (pourvoi n° 23-17.474, inédit)

I. La société Enedis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 23-17.474 contre deux arrêts RG n° 21/03861 et 19/05201 rendus le 30 mars 2023 par la cour d’appel de Rennes (7e chambre prud’homale), dans le litige l’opposant à M. [B] [D], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
(…)

Faits et procédure

3. Selon les arrêts attaqués (Rennes, 30 mars 2023, RG n° 19/05201 et 5 octobre 2023, RG n° 21/03861), M. [D] a été engagé en qualité de technicien intervention réseau le 25 mai 2012 par la société Electricité réseau de distribution de France, devenue la société Enedis.

4. A l’issue d’un examen médical du 5 décembre 2013, le médecin du travail a conclu à l’inaptitude au poste de travail et à l’aptitude du salarié à un poste de bureautique pur, avec la restriction sans port de charge de plus de 15 kg.

5. Le salarié a été placé en arrêt de travail à compter du 6 décembre 2013, puis en longue maladie avec effet rétroactif au 17 juillet 2013.

6. Le salarié a saisi le 26 juin 2018 la juridiction prud’homale de demandes de rappels de salaires au titre de l’article L. 1226-4 du code du travail, considérant que le médecin du travail avait rendu un avis d’inaptitude le 5 décembre 2013.

7. Le 2 mai 2019, l’employeur a placé le salarié en inactivité d’office pour absence injustifiée et refus de se soumettre à un examen médical obligatoire sans motif légitime.

Examen des moyens
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9. L’employeur fait grief à l’arrêt RG n° 19/05201 du 30 mars 2023 de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, de dire que l’avis du médecin du travail du 5 décembre 2013 était un avis d’inaptitude, d’annuler la sanction de blâme avec inscription au dossier du 5 septembre 2018 et de le condamner à payer au salarié des sommes à titre de rappels de salaires et congés payés afférents, de gratifications et congés payés afférents, de primes de naissance et congés payés afférents et au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel, alors « que l’action consistant à saisir le juge du fond pour déterminer si un avis médical doit relever de la qualification d’avis d’aptitude ou d’inaptitude s’assimile à une contestation sur la nature de l’avis médical litigieux ; qu’en l’état des dispositions applicables au litige, la contestation d’un avis médical était enfermée dans un délai de deux mois et ne relevait pas de la compétence du conseil de prud’hommes, mais de la compétence de l’inspecteur du travail ; que pour dire l’action recevable et non prescrite, la cour d’appel s’est en réalité prononcée sur la régularité de l’avis médical du 5 décembre 2013 à la qualification duquel elle a procédé pour retenir qu’il s’agissait d’un avis d’inaptitude ; qu’excédant ses pouvoirs, la cour d’appel a violé les articles L. 1471-1 et R. 4624-35 du code du travail dans sa version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

10. La cour d’appel, qui a constaté que le 5 décembre 2013, le médecin du travail avait conclu à l’inaptitude au poste de travail et à l’aptitude du salarié à un poste de bureautique pur, sans port de charge de plus de 15 kg, a exactement déduit que l’avis du médecin du travail du 5 décembre 2013 était un avis d’inaptitude, peu important que cet avis porte en en-tête « avis d’aptitude », et vise les articles D. 4624-47 et 49 du code du travail.

11. Le moyen n’est donc pas fondé.

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PAR CES MOTIFS (…) : REJETTE (…)