La procédure de contrôle encadrant l’intervention de l’inspecteur du recouvrement, fait partie intégrante des règles processuelles du contentieux afférent, lorsque le cotisant conteste le redressement. Ainsi l’irrégularité du contrôle peut contraindre le Juge à définitivement annuler la décision de l’organisme collecteur.

Il en est ainsi par exemple du respect du principe du contradictoire. Illustration de l’importance de cette protection de l’assujetti, nous est donnée par l’arrêt ci-dessous reproduit.

L’entreprise contrôlée doit ainsi être informée systématiquement lors de toutes les phases du contrôle, qu ‘il s’agisse d’un contrôle sur pièces ou sur place. Par conséquent lorsqu’elle accepte la méthode de l’échantillonage, elle doit notamment recevoir les résultats de l’étude exhaustive des échantillons, pour pouvoir notifer ses éventuelles observations avant l’extrapolation des résultats sur tout le champ du contrôle.

Or si cette phase contradictoire n’est pas respectée, le contrôle est nul. Les opérations de contrôle se terminent par la notification de la lettre d’observations de l’inspecteur du recouvrement : l’entreprise peut faire valoir ses observations, qui seront transmises à l’URSSAF (ou la MSA), mais les échanges qui peuvent s’ensuivrent entre l’entreprise et l’inspecteur ne remettent pas en cause la clôture du contrôle.

Par conséquent l’inspecteur du recouvrement ne peut unilatéralement « annuler » et réitérer sa letttre d’observation, afin de neutraliser une irrégularité fondamentale commise lors du contrôle. Aucune reprise des opérations de contrôle ne peut en effet avoir lieu après la notification de la lettre d’observation.

COUR DE CASSATION, 2ème Ch. civ., 5 JANVIER 2023 (pourvoi n° 21-14.706, publié au Bulletin)

L’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) Aquitaine, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-14.706 contre l’arrêt rendu le 4 février 2021 par la cour d’appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l’opposant à la société [2], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
(…)

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 4 février 2021), à la suite d’un contrôle portant sur les années 2011 et 2012, l’URSSAF Aquitaine (l’URSSAF) a notifié à la société [2] (la société) un redressement comportant plusieurs chefs relatifs, notamment, aux frais professionnels de ses salariés.

2. La société a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
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Enoncé du moyen

4. L’URSSAF fait grief à l’arrêt d’annuler les chefs de redressement relatifs aux frais professionnels des salariés, alors « que respecte le caractère contradictoire de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation l’URSSAF qui informe l’employeur des résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l’échantillon et des régularisations envisagés et invite l’employeur à faire part de ses remarques ; que cette information peut valablement être donnée après l’envoi d’une première lettre d’observations dès lors que l’URSSAF a annulé cette lettre d’observations et l’a remplacée par une seconde lettre d’observations adressée à l’employeur après qu’il a pu faire valoir ses remarques sur les résultats précédemment communiqués ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté qu’après l’envoi d’une première lettre d’observations du 18 octobre 2013, l’URSSAF avait communiqué à la société, par lettre du 23 décembre 2013, les résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant les échantillons et les régularisations envisagés et l’avait invité à faire part de ses observations sur ces résultats jusqu’au 13 janvier 2014, que la société y avait répondu le 10 janvier 2014, puis que l’URSSAF lui avait notifié une seconde lettre d’observations du 7 février 2014 annulant et remplaçant valablement celle du 18 octobre 2013 ; qu’en jugeant que l’employeur n’avait pas été associé à la troisième phase du contrôle par échantillonnage et extrapolation et en annulant les chefs de redressements consécutifs lorsqu’il résultait de ses constatations que l’employeur avait été informé des résultats des vérifications et des régularisations envisagée, qu’il avait été invité à faire ses remarques et qu’il avait formulé ses observations avant l’issue de la procédure de contrôle matérialisée par l’envoi de la seconde lettre d’observations annulant et remplaçant la première, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses constatations et a violé les articles R. 243-59 et R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007 applicable au litige et l’arrêté du 11 avril 2007 définissant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation pris en application de l’article R. 243-59-2 du même code. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte de l’article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige, et de l’arrêté du 11 avril 2007 définissant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation, pris en application de cet article, que la mise en oeuvre, aux fins de régulation du point de législation, des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation suit un protocole composé de quatre phases : la constitution d’une base de sondage, le tirage d’un échantillon, la vérification exhaustive de l’échantillon et l’extrapolation à la population ayant servi de base à l’échantillon. Dans le cadre de la procédure contradictoire, l’employeur est associé à chacune de ces phases et doit notamment être informé à l’issue de l’examen exhaustif des pièces justificatives, correspondant à la troisième phase, des résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l’échantillonnage et des régularisations envisagées et être invité à faire part de ses remarques afin que les régularisations soient, le cas échéant, rectifiées.

6. La lettre par laquelle l’inspecteur du recouvrement répond, en application de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, aux observations formulées par le cotisant à la suite de la notification de la lettre d’observations, ne constitue pas une nouvelle lettre d’observations.

7. L’arrêt relève que la lettre d’observations du 18 octobre 2013 ne comporte aucune mention de la remise à l’employeur des résultats des vérifications effectuées sur l’échantillon préalablement à la délivrance de cette lettre d’observations. Il retient que l’employeur n’a pas été associé à la troisième phase du contrôle. Il énonce que l’URSSAF, qui n’a pas respecté le principe de la contradiction lors des troisième et quatrième phases de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation, n’a pas pu valablement régulariser la procédure en communiquant le 23 décembre 2013, après l’envoi de la lettre d’observations du 18 octobre 2013 et en réponse aux observations formulées par la société, les résultats de l’analyse des pièces justificatives de chacun des échantillons.

8. De ces constatations et énonciations, la cour d’appel a exactement déduit que la procédure d’échantillonnage et d’extrapolation appliquée par l’URSSAF était irrégulière, de sorte que les chefs de redressements relatifs aux frais professionnels devaient être annulés.

9. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, (…) : REJETTE (…)